Tanka - prose et Haïbun
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Poètes de tanka 19e au 21e siècle - histoire du tanka -
Mise à jour : 1er mars 2018
Haïbun et tanka-prose : quelques éléments de réflexion et un nouveau lire :
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Le haïbun est une composition
littéraire dans laquelle prose et haïku se mêlent en une brève narration
poétique d’une expérience réelle ou imaginaire.
Le haïbun peut prendre
souvent, mais pas exclusivement, la forme d’un récit de voyage, le plus célèbre
exemple étant l'œuvre majeure du poète Matsuo Bashô (1644-1694) Hoku
no hosomichi, texte traduit et annoté par Alain Walter, aux Editions William
Black & Co, sous le titre L’Étroit chemin du fond. Autres
traductions : La Sente étroite du Bout-du-Monde, Sur le
chemin étroit du Nord profond ou encore Le Chemin étroit vers
les contrées du Nord.
Pratiquant à la fois le
haïku, le tanka et le haïbun, je trouve ces trois genres très différents mais
en même temps complémentaires. Le haïku fait jaillir l'instant et la
spontanéité ; le tanka prolonge des expériences en les sublimant à la manière
d’un chant qui laisse s’exprimer le sentiment ; le haïbun, prose et
poésie-haïku mêlées, décline la vie sur des modes variés et dans les trois
espaces temporels. Le haïku, survenant dans le haïbun, introduit une diversion,
une réorientation du regard soudain focalisé sur l’immédiateté, le concret,
"l'ici et maintenant". C’est pourquoi il ne constitue pas une banale
illustration du propos : éclos dans les plis de la prose, il entretient
avec le récit des liens très subtils. Ce divertissement inattendu doit surgir
le plus naturellement possible et ravir le lecteur, c’est à dire lui laisser
une impression forte. Aussi, afin de ne pas émousser le plaisir, le poète sera
attentif à ne pas émailler son haïbun de haïkus trop nombreux, mais à les
distiller opportunément. Plus le haïku sera rare, plus il gagnera en puissance.
Un seul peut suffire même, plutôt placé en position finale.
Danièle Duteil
Le
tanka-prose
Le tanka prose remonte aux origines
de la littérature japonaise. Après plus de dix siècles, on continue à en
écrire. Il semble que prose et tanka soient allés de pair depuis toujours. Qui
plus est, le tanka tenait une place majeure dans les échanges épistolaires
entre deux personnes. Le tanka appelait donc une réponse. L’alliance de la
prose et de la poésie se rencontre dans les contes et récits à poèmes (uta
monogatari), les autobiographies, et les notes journalières, ou journaux
intimes (nikki). Nous trouvons cette forme sous la plume des femmes notamment
qui ont commencé à écrire en japonais, alors que les hommes de la Cour impérial
écrivaient encore en chinois.
Le plus ancien est sans doute L’Ise
monogatari (« Les contes d’Ise»), écrit sans doute au tout début du Xe siècle,
comporte. 143 anecdotes et contes entrecoupés de 209 waka. Mais, dans de
nombreux textes anciens, la prose sert avant tout à annoter des poèmes qui
constituent le cœur du texte. C’est le cas par exemple pour Le Journal de Tosa
(« Tosa Nikki », de Ki No Tsurayuki.
Dans les tanka-prose contemporains
anglophone, il n’est pas rare de lire des textes en anglais très courts,
composés d’un paragraphe en prose succinct suivi ou précédé (plus souvent suivi
semble-t-il) d’un seul tanka. Souvent, la longueur de nombreux tanka prose
n’excède pas une demi-page.
Dans la francophonie, à partir des
textes publiés, nous pouvons voir que le tanka s’immisce presque dans la prose
comme une narration dans la narration. Jouant parfois sa partition dans une
autre dimension, il peut creuser un décalage spatio-temporel intéressant.
Dans une prose au présent, le
tanka, au passé ou au futur proche, déplace habilement la scène, créant des
ponts entre l’instant et la scène vécus maintenant dans la prose, et ce qui fut
ou ce qui bientôt adviendra.
Le tanka prose, s’il finit par un
tanka, invitera peut-être davantage à la réflexion ou à la rêverie au sortir du
texte, par l’ouverture contenue dans ses deux dernières lignes.
Sources
bibliographiques dans l’ordre chronologique des œuvres d’origine :
·
Le
Dit du Genji, Murasaki
Shikibu, trad. René Sieffert, 2 vol., POF, Aurillac, 1988, ISBN 978-2716902625
·
Izumi
Shikibu nikki (journal d’Izumi Shikibu, année 1003 – 1004, d’Izumi
Shikibu (976? – après 1027),
·
Murasaki
Shikibu (journal de Murasaki Shikibu), années 1008 -1010),
de Murasaki Shikibu, traduit par
·
Sarashina
nikki (Le journal de Sarashina), années 1020 -1059, de
la fille de Sugawara no Takasue (1008 - ?)
·
Jôjin
ajari no haha no shû (Un malheur absolu), année 1067 – 1073, de la Mère
du révérent Jôjin –(988 – 1073 ?)
·
Sanuki
no suke nikki (Journal de Sanuki no suke), années 1107 – 1108),
de Fujiwara no Nagako (1079 - ?)
·
Mumyô-sôshi (D'une
lectrice du Genji) vers 1200, de la fille de Fijiwara no Shunzei, trad. René
Sieffert, POF, Aurillac – ISBN 003246353